Actuellement, la fibre de chanvre est surtout utilisée pour l’industrie papetière, les matériaux isolants et les biocomposites. Entre 1993 et 1996, la culture du chanvre industriel a été légalisée dans la plupart des États membres de l’UE, d’autres ont été suivies plus tard. En 2011, la zone de culture a diminué à sa plus faible valeur depuis 1994 (environ 8 000 ha), mais a augmenté de façon continue dans les années 2012 à 2016, pour atteindre finalement plus de 33 000 ha en 2016. Aujourd’hui, la zone de culture du chanvre industriel couvre sa plus grande surface depuis la seconde guerre mondiale. L’Association européenne du chanvre industriel prévoit des zones de culture presque constantes ou à croissance modérée dans les prochaines années. Les principales zones de culture européennes sont situées en France, aux Pays-Bas, dans les pays baltes et en Roumanie. Ces dernières années, de nombreux nouveaux pays européens ont commencé ou développé leur culture pour le marché des aliments santé, mais le secteur de la fibre de chanvre augmente aussi, pour couvrir la demande croissante de l’industrie automobile. Pour exemple du développement de cette matière naturelle en France, en un an la coopérative auboise La Chanvrière de l’Aube, premier producteur européen de chanvre, est passé de 340 à 430 coopérateurs passant de 6500 ha de surfaces engagées en 2016 à 7800 ha en 2017.
Mais plusieurs autres développements ont été annoncés cette année.
Ainsi, une entreprise du Nebraska, Bastcore, LLC , achète du chanvre brut cultivé par des agriculteurs américains et possède un procédé exclusif de transformation des tiges de chanvre en matériaux commerciaux, pour les textiles, les composites et la production d’énergie. Elle vient de signer en octobre 2017 son premier contrat de fourniture de fibres de chanvre américain à Recreator, un fabricant de vêtements basé à Los Angeles.
Un peu plus tôt dans l’année, la célèbre marque américaine Patagonia avait lancé une ligne de vêtements de travail fabriqués avec de la toile Iron Forge Hemp, un mélange de chanvre industriel, de polyester recyclé et de coton organique qui, selon elle, est plus durable, résistant à l’abrasion et confortable sur le rack que la toile classique en coton. Les vêtements de travail visent les agriculteurs, les constructeurs, les éleveurs, les forestiers …avec une collection de vêtements de travail spécifiques à la fonction qui utilisent des matériaux moins nocifs sans sacrifier la fonctionnalité.
En France, la jeune marque landaise Nunti Sunya s’est lancée dans la création de T-Shirts en chanvre ou en coton bio. Cepovett, numéro 1 du vêtement professionnel français, recherche quant à elle des matières alternatives et éthiques . En dehors du coton bio et équitable et du polyester recyclé déjà utilisé en partie, la société souhaite développer l’utilisation de chanvre et de lin. Le Groupe Velcorex Matières françaises annonçait lui lors d’une conférence de presse le 13 septembre 2017 son entrée en Bourse, afin notamment, entre autre objectifs, de pouvoir accélérer sur des projets tels que le développement d’une filière complète de fibres naturelles (chanvre et ortie) en Alsace.
Dans un autre domaine, celui de la construction et du bâtiment, le cimentier français Vicat a annoncé début 2017 la réalisation de la première maison individuelle en France par projection mécanique de son béton de chanvre PromptUp. Les sociétés Le Barbançon et ARB ont utilisé le mélange de ciment naturel et de particules de chanvre directement sur coffrage. Vicat indique que les solutions biosourcées sont « particulièrement appréciées pour les apports en termes de confort thermique, acoustique et hygrothermique. Autre exemple de développement, prévu pour décembre 2017, en Sud Essonne, un partenariat public privé a été créé pour la construction et l’entretien d’une route dont la sous-couche intègre du chanvre local. Le procédé, mis au point par la société Charier, permet d’utiliser moins de bitume, ce qui est écologique mais aussi économique, la fibre de chanvre étant bien moins coûteuse. Le chanvre sera fourni par la filière locale récemment structurée en Essonne autour de l’association d’agriculteurs Chanvre Avenir, et de la SARL Gatichanvre.
Enfin, dans un des domaines de prédilection de la fibre de chanvre, qui est celui des transport, mais cette fois hors automobile, la cabine de train Regio 2N est une des plus grandes pièces composites renforcées par des fibres végétales. Ce démonstrateur ferroviaire a été présenté pour la première fois lors de JEC World 2017 à Paris Nord Villepinte. La cabine du train Regio 2N est habituellement produite avec des fibres de verre en infusion et moulage en contact. Elle a été intégralement repensée et réétudiée par ordinateur pour substituer ce matériau synthétique par des fibres de lin et de chanvre comme renforts. La fabrication de la cabine du Regio 2N s’est fait en collaboration entre producteurs, industriels et experts dans le cadre du projet investissement d’avenir SINFONI ( note: le consortium de Sinfoni a créé un Observatoire des « marchés des fibres végétales techniques matériaux -hors bois- qui a publié un premier memento cette année).
A noter également hors de nos frontières que la première unité wallonne de défibrage de chanvre industriel a été inaugurée en septembre 2016, “l’amorce d’une filière prometteuse”, qui pourrait se développer dans les années à venir. La culture du chanvre s’est redéveloppée dès 2009, principalement dans les provinces de Namur et de Luxembourg. Aujourd’hui, la filière compte 400 hectares cultivés et quatre entreprises de transformation. L’objectif, d’ici à 2020, est de monter à 1000 hectares et d’exporter. Le centre de recherches Agri-Développement CER Groupe qui est à l’origine du projet de l’usine de Marloie, a développé des machines expérimentales uniques au monde pour le défibrage (contrairement aux classiques des broyeurs à marteaux) afin d’obtenir une grande finesse de fibres, et pouvoir concurrencer le lin dans l’industrie textile.
Source: IFTH, le 19/10/17