Il y a quelques semaines, le Fashion Transparency Index notait les 200 plus grandes marques et produisait un rapport de 87 pages partant d’un constat simple : sur un sondage réalisé par Fashion Revolution et Ipsos Mori, auprès de 5000 consommateurs européens, 80% considèrent que les marques devraient révéler leurs fabricants.
Qu’est-ce que c’est la transparence et qu’implique-t-elle ?
Ainsi que le déclare Sarah Ditty, policy director chez Fashion Revolution, l’index a été développé comme un outil permettant de scruter ce que les plus grandes marques de vêtements révélaient. Pour les consommateurs, cette transparence se traduit en une confiance complète en la marque, impliquant pour cette dernière qu’elle soit tenue responsable des actions qu’elle commet et de l’incidence qu’elle a tant aux niveaux écologique, humain et environnemental.
Pour évaluer la transparence, l’étude considère la transparence comme la possibilité d’un accès aux données et informations de la marque, de ses relations avec tous ses fournisseurs, de ses pratiques commerciales et leurs effets sur les travailleurs et travailleuses, sur les différentes communautés concernées ainsi que sur l’environnement. La transparence n’est pas le but ultime atteindre, mais est réellement envisagée comme un outil de compréhension et donc un premier pas vers un changement systémique plus global.
Les critères du “Fashion Transparency Index”
5 points clés sont mobilisés pour pouvoir dresser l’analyser et faire le compte des points, répartis comme suit :
- La politique et les engagements (49 points) : quelle est la politique environnementale de l’entreprise, et comment est-elle mise en place ? Comment la marque décide-t-elle des problèmes qu’elle traite en priorité et enfin quels sont les objectifs de la marque pour améliorer son incidence ?
- Gouvernance (12 points) : Existe-il des instances d’autorité au sein de l’entreprise en charge des effets sociaux et environnementaux de celle-ci ? Existe-t-il un département ou une personne qui peut être contacté.e pour répondre aux questions ? Comment l’entreprise fait-elle le lien entre respect des droits de l’homme, les questions environnementales et le traitement de ses employés et fournisseurs ?
- Traçabilité (85 points) : l’entreprise a-t-elle une liste de ses fournisseurs, des matières premières utilisées à à la fabrication, et si oui, à quel niveau de détail ? La question est importante dans la mesure où l’argument de la difficulté de la traçabilité est souvent mis en avant par les marques.
- Savoir, Montrer, Réparer (70 points) : Comment la marque évalue la mise en oeuvre de sa politique de fournisseurs ? Comment la marque résolue-t-elle les problèmes lorsqu’ils concernent les installations fournisseurs ? Comment les travailleurs peuvent-ils exprimer leurs doléances ?
- Les questions d’actualités (34 points) : que fait la marque en matière d’égalité de genre et de sexe, ainsi que pour l’empowerment des femmes ? Que fait la marque pour soutenir la liberté d’association et le paiement des salaires ? Que fait la marque dans son traitement des déchets et du recyclage, en matière de production durable et de changement climatique ?
De ces 5 points clés, découlent 250 points sur lesquels les entreprises ont été évaluées.
Que cherche à évaluer le rapport et selon quelle méthodologie ?
Le rapport évalue non pas les performances de marques en matière d’éthique ou de durabilité, mais plus exactement la quantité d’information dévoilée concernant leurs politiques environnementales, leur pratiques, leur incidence et leur respect des droits humains.
Les marques ont été choisies sur la base d’un turnover annuel de plus de 550 millions de dollars, sur différents segments de marchés , en Europe, Amériques et Asie. 46% des marques ont complété et retourné le questionnaire qui leur était adressées, 52% des marques interrogées n’ont pas répondu, les derniers 2% ont quant à eux décliné l’invitation à remplir le questionnaire.
En résulte un rapport de 87 pages, disponible en ligne, qui tire la première conclusion suivante : sur la base de 250 points, le pourcentage de réalisation moyen est de 21%. Ce qui est évidemment peu, d’autant plus que sur les 250 marques, 72 d’entre elles atteignent ont un score situés entre 0 et 10%. Des marques telles que Adidas, Reebok, Patagonia, Esprit et H&M se situent aux alentours de 61-70%. Asos, Marks and Spencer et Gap remplissaient quant à eux 51 à 60% des objectifs. Force est-il de constater cependant que la majorité des marques sélectionnées ne dépassent pas les 30%.
Le rapport met cependant en avant ses propres lacunes : il n’a pas vocation à analyser de manière profonde le contenu des marques, qui lui-même peut être difficilement vérifié par l’organisme. Par ailleurs, les marques ayant choisi de répondre au questionnaire ont pu voir leur note s’élever, simplement parce que les responsables de l’étude ont reçu des informations qu’ils n’avaient pas pu trouver eux mêmes.
La force du rapport réside peut être avant tout dans sa capacité à présenter la transparence non comme une menace pour la compétitivité des entreprises, mais comme un outil leur permettant de mieux saisir les rouages de leur chaîne et de prendre des décisions mieux informées, qui bénéficieraient in fine, certes à leurs employés et fournisseurs mais aussi à leur propre économie, leur image et bien entendu aux consommateurs.
-14/05/19-