Mode in Textile

Les techniques de camouflage s’étoffent

Du fantasme à la réalité, les technologies de camouflage, en particulier à visée militaire, visent à intégrer des dispositifs toujours plus légers, confortables et intelligents. Elles sont l’objet de nombreux projets de recherche et développement à travers le monde. Voici donc un petit focus sur les dernières avancées en la matière.

En effet, une équipe scientifiques de l’Université américaine Cornell viennent de créer un tissu artificiel de camouflage inspiré de la peau du poulpe et de la seiche, deux animaux qui ont capacité à changer d’apparence tels le caméléon pour se fondre dans l’environnement et échapper à leurs prédateurs. Ces chercheurs ont mis au point un matériau activé pneumatiquement qui imite le fonctionnement des papilles, de petites éminences charnues à la surface d’une muqueuse. Cette avancée technologique a permis de fabriquer un tissu synthétique pouvant passer d’une forme en deux dimensions à une autre en trois dimensions en se rétractant.

Ce n’est pas la première fois que le biomimétisme inspire  la communauté scientifique pour enfin trouver l’hypothétique solution d’invisibilité parfaite. Une équipe de chercheurs de l’université de Bristol avait ainsi déjà annoncé en 2015 avoir mis au point un textile intelligent qui peut répliquer le système de camouflage naturel des céphalopodes. La peau artificielle était alors fabriquée à partir de fines feuilles d’un matériau intelligent appelé «élastomère diélectrique électroactif», un matériau souple et caoutchouteux qui peut être contrôlé électriquement.

 

Mais les recherches vont bien au-delà du biomimétisme. Par exemple, en 2015 des chercheurs du Lawrence Berkeley National Laboratory et de l’Université de Californie à Berkeley proposaient une avancée avec la création d’une petite “cape d’invisibilité”  (80 nanomètres), dont le principe était basé sur des éléments à base d’or qui rendraient un objet indétectable par réorientation de la lumière.

Depuis, d’autres résultats de recherche ont été publiés. Par exemple, des scientifiques indiens proposaient l’année dernière de mettre au point des textiles à couleurs changeantes pour des applications militaires de camouflage. Des tissus de coton ont été imprimés à l’aide de pigments thermochromes qui permettent, lorsque l’on augmente la température via une source externe, de passer d’un motif de type jungle à un motif de type désert.

En associant des technologies numériques et d’éclairage,  des chercheurs chinois sont eux parvenus en 2016 à mettre au point un système de camouflage par lumière, grâce à des matériaux organiques électrochromes couplés à une étoffe conductrice. Un polymère spécifiquement intégré au système serait capable de changer de couleur en une seconde ou une seconde et demie, ce qui augurerait d’un bon dispositif de camouflage pour le combattant, d’autant plus que le matériau est hydrophobe et absorbe les infrarouges. Des étoffes à propriétés caméléon ont ainsi été réalisées, c’est-à-dire qu’elles opèrent un changement adaptatif selon l’environnement dans lequel elles se trouvent.

Très récemment, des chercheurs de la Saratov State University en Russie ont conçu une tenue incorporant des éléments capables d’absorber les ondes radio et les ondes radar. Ce développement, basé sur une membrane nanofibreuse respirante, permettrait à des soldats portant des tenues de combat ordinaires, sans en modifier les propriétés textiles, de devenir invisibles faces aux dispositifs de détection de l’ennemi. De minuscules cellules sensibles à la lumière vont détecter les signaux électriques et les couleurs environnants, puis stimuler des colorants thermosensibles afin de reproduire ces couleurs. Cette fonctionnalité est étudiée dans le cadre d’un programme visant à concevoir la future tenue de combat (Ratnik) du fantassin russe qui devrait être développée entre 2025 et 2030.

Des chercheurs de l’Université de l’état de l’Iowa mettent également au point des méta matériaux technologiques capable de faire « disparaître » des éléments, au moins devant les caméras si ce n’est à l’oeil nu, grâce à l’intégration de “résonateurs” remplis de feuilles de silicone dans un système souple, flexible et étirable. Lorsque des objets sont enveloppés dans cette “méta-peau”, les ondes radar sont supprimées dans toutes les directions incidentes et les angles d’observation. Ceci permettrait de supprimer certaines ondes radars jusqu’à 75%.

Enfin, hors applications militaires le “grand public”n’est pas oublié: pour exemple, le  néerlandais d’origine indienne Saif Siddiqui a inventé une “écharpe d’invisibilité”, appelé ishu, qui noircit la photo d’une personne qui le porte lorsque de la prise de vue avec un flash. Le matériau dont l’ishu est composé comprend des millions de nano-cristaux sphériques qui neutralisent la lumière du flash des téléphones mobiles ou des appareils photos. Les foulards monochromes avec des imprimés géométriques sont disponibles en différentes couleurs.

Pour vivre heureux, vivons cachés?

Source: IFTH – le 13/10/17